Anastasica

    De Wiki Maria Valtorta
    D'après un portrait du Fayoum (Égypte, Ie – IIIe siècle). Le visage qu’aurait pu avoir Anastasica.

    Son nom désigne une fleur du désert qui a la particularité de se dessécher presque totalement, mais de refleurir à la première pluie. Son père, un riche marchand de Jéricho, parti très jeune en Syrie faire fortune, lui a donné ce nom évocateur du pays de ses origines.

    Elle se marie avec un notable de Jéricho, Samuel, qui ne tarde pas à l'accuser de lèpre pour la répudier et épouser une autre femme dont il était amoureux.        
    "On m'appelle lépreuse, confie Anastasica à Jésus. Mais j'ai seulement une plaie à la poitrine, et elle m'a été donnée par mon mari qui m'a prise vierge et saine, mais lui n'était pas sain. Mais c'est un grand... et il a tout pouvoir. Même celui de dire que je l'avais trahi en venant à lui malade et de me répudier."[1]
    Pendant plusieurs mois, elle cherche Jésus dont elle avait entendu parler par des passants compatissants. Elle risque la lapidation pour avoir fui sa léproserie. Jésus la rencontre affamée et épuisée. Il la guérit :
    "(Simon le Zelote dit) Maître, une sœur lépreuse. Je ne sais pas si elle est morte. On ne dirait pas. Il me semble que le cœur bat encore."    

    "Tu l'as touchée ?!" crient plusieurs en s'éloignant. 

    "Oui. Je n'ai pas peur de la lèpre, depuis que j'appartiens à Jésus. Et j'ai pitié, car je sais ce que c'est que d'être lépreux. Peut-être la malheureuse a-t-elle été frappée, car elle saigne de la tête. Peut-être elle était descendue chercher de la nourriture. C'est terrible, savez-vous, de mourir de faim et d'être obligé de défier les hommes pour avoir un pain."         

    "Elle est très abîmée ?"   "Non. Je ne sais pas comment elle est parmi les lépreux. Elle n'a pas de squames, ni de plaies, ni de gangrène. Elle l'est peut-être depuis peu. Viens, Maître, je t'en prie. Comme pour moi, aie pitié de la sœur lépreuse !"       

    "Allons. Donnez-moi du pain, du fromage et le peu de vin qui nous reste." (...) Ils voient Jésus qui se penche, la prend par-dessous les bras, la transporte et la fait asseoir contre un rocher. Elle laisse aller sa tête comme si elle était morte. (...) "Elle est gelée, la malheureuse ! Et elle est toute trempée."

    (...) le vin agit. La femme pousse un soupir fatigué. Jésus, voyant qu'elle avale, lui en fait couler une gorgée dans la bouche. (...) La femme ouvre deux yeux embués et épouvantés. Elle voit des hommes. Elle essaye de se lever et de fuir en criant :  "Je suis infectée ! Je suis infectée !"    

    Mais les forces lui manquent. Elle se couvre le visage avec les mains. Elle gémit : "Ne me lapidez pas ! Je suis descendue parce que j'ai faim... Cela fait trois jours que personne ne m'a rien jeté..."          

    "Voici du pain et du fromage. Mange. N'aie pas peur. Bois un peu de vin dans ma main" dit Jésus en se versant dans le creux des mains un peu de vin et en le lui donnant.         

    "Mais tu n'as pas peur ?" demande la malheureuse stupéfaite. "Je n'ai pas peur" répond Jésus. Et il sourit en se levant, mais il reste près de la femme qui mange avidement le pain et le fromage. Elle semble un fauve affamé. Elle halète dans l' anxiété de se nourrir.     

    Puis, une fois apaisé le désir animal de son estomac vide, elle regarde tout autour... Elle compte à haute voix : "Un... deux... trois... treize... Mais alors ?... Oh ! qui est le Nazaréen ? Toi, n'est-ce pas ? Toi seul peut avoir pitié d'une lépreuse, comme tu l'as eu… !"  

    La femme se met à genoux difficilement à cause de sa faiblesse. "C'est Moi, oui. Que veux-tu ? Guérir ?"         

    "Oui... Mais auparavant je dois te dire une chose... J'avais entendu parler de Toi. Quelques passants m'en avaient parlé il y a tellement longtemps... Tellement ? Non. C'était l'automne. Mais pour un lépreux... chaque jour vaut une année... J'aurais voulu te voir, mais comment aurais-je pu venir en Judée, en Galilée ? On m'appelle "lépreuse". Mais j'ai seulement une plaie à la poitrine, et elle m'a été donnée par mon mari qui m'a prise vierge et saine, mais lui n'était pas sain. (...)

    Hier soir un homme est passé par Betjaboc, annonçant que tu venais et qu'il allait à ta rencontre pour te chasser. Moi, j'étais là... étant descendue jusqu'aux maisons parce que j'avais faim. J'aurais fouillé dans le fumier pour me rassasier... Moi qui avais été une "dame" j'aurais cherché à prendre aux poules un peu de pâtée aigrie..."  Elle pleure... Puis elle reprend : 

    "L'angoisse de te trouver, pour Toi, pour te dire : "Fuis !"; pour moi, pour te dire : "Pitié !" m'a fait oublier que, contrairement à notre loi, les chiens, les porcs, les poulets vivent près des maisons d'Israël, mais que le lépreux ne peut descendre demander un pain, pas même une femme qui n'a de lépreux que le nom. Et je me suis avancée pour demander où tu étais. Ils ne m'ont pas vue tout de suite dans l'ombre, et ils m'ont dit : "Il monte par la berge du fleuve".

    Mais ensuite ils m'ont vue et ils m'ont jeté des pierres au lieu de pain. Je suis accourue pendant la nuit pour venir à ta rencontre, pour fuir les chiens. J'avais faim, j'avais froid, j'avais peur. Je suis tombée là où tu m'as trouvée. Ici. J'ai cru mourir. Au contraire je t'ai rencontré, Toi. Seigneur, je ne suis pas lépreuse, mais c'est cette plaie à la mamelle qui m'empêche de revenir parmi les vivants (...) Mais, d'abord, sauve-toi. Ne meurs pas, Toi qui es bon !"   

    "Moi, je ne mourrais pas tant que ce ne sera pas l'heure. - Va là-bas à ce rocher. Il y a une grotte sûre. Repose-toi et ensuite va trouver le prêtre." (...)

    Jésus sourit : "Redeviens la Rose de Jéricho qui fleurit dans le désert et qui vit toujours même si elle paraît morte. Ta foi t'a guérie." 

    La femme entrouvre son vêtement sur la poitrine, elle regarde et elle crie : "Plus rien ! Oh ! Seigneur, mon Dieu !" Et elle tombe le front contre terre.      

    "Donnez-lui du pain et de la nourriture. Et Toi, Matthieu, donne-lui une paire de tes sandales. Moi, je vais lui donner un manteau pour qu'elle puisse aller trouver le prêtre quand elle se sera restaurée. Donne-lui aussi l'obole, Judas, pour les dépenses de la purification. Nous l'attendrons au Gethsémani pour la donner à Élise. Elle m'a demandé une fille." 

    "Non, Seigneur, je ne me repose pas. Je vais tout de suite, tout de suite." "Descends au fleuve, alors, lave-toi, mets le manteau..."    

    "Seigneur, dit le Zélote, je vais le donner à la lépreuse. Permets-le-moi et je la conduirai à Élise. Je guéris une seconde fois, en me revoyant en elle, heureux."(...)

    "Seigneur ! Quand pourrai-je te baiser les pieds ?" "Bientôt. Va. Mais sache que seul le péché me donne de la répulsion. Et pardonne à ton époux, parce que c'est par son intermédiaire que tu m'as trouvé." "C'est vrai. Je lui pardonne. Je pars..."[2]
    Il la confie donc à Élise de Bethsour, une veuve très éprouvée par le deuil de son mari et de ses deux fils, qui ne pouvait rêver mieux :
    "Élise de Beth-Çur, viens là. Console cette femme qui n’est guère qu'une enfant..."

    Et de sa main, il met Anastasica dans les bras d'Élise. Il les observe pendant qu'Élise la caresse et que l'autre s'abandonne dans ces bras maternels, et puis il demande : "Élise, connais-tu son Histoire" "Oui Seigneur. Et elle me fait tant de peine, pauvre colombe sans nid."

    "Élise, aimes-tu cette sœur ?" "L'aimer ? Tellement, mais pas comme une sœur. Elle pourrait être ma fille. Et maintenant que je la tiens dans mes bras, il me semble redevenir la mère heureuse du temps passé. À qui vas-tu confier cette douce gazelle ?"

    "À toi. Élise." "À moi ?" La femme desserre le cercle de ses bras pour regarder le Seigneur, incrédule… "À toi. Tu ne la veux pas ?"

    "Oh ! Seigneur ! Seigneur ! Seigneur !"... Élise, à genoux, rampe vers Jésus, et elle ne sait pas, elle ne sait pas comment, ce que dire ce que faire pour exprimer sa joie.

    "Lève-toi et sois pour elle saintement mère, et qu'elle soit pour toi saintement fille, et avancez toutes les deux sur le chemin du Seigneur."[3]

    (A la fin de la journée du banquet des pauvres, où Jésus les a réunies) : "Élise et Anastasica (...) un peu plus loin, se tiennent par la main en se regardant dans les yeux avec un sourire qui éclaire une larme de joie."[4]

    Progressivement Élise s'établit à Nobé, village proche de Jérusalem, pour y servir Jésus.       La jeune Anastasica ne quitte plus Élise, sauf lorsque le refuge de la troupe apostolique à Nobé, près de Jérusalem, abrite un Judas coureur de femmes et en rupture de ban.[5]        

    Elle est tout naturellement présente parmi les disciples lors de l'Ascension de Jésus.[6]    

    A-t-elle retrouvé, avec son héritage, une propriété à Jéricho ou prend-elle la succession d'Élise ? En tous cas, sa maison était devenue un des refuges habituels des disciples jusqu'à leur dispersion à l'approche des persécutions d'Hérode Agrippa 1er, comme en témoigne une conversation entre Pierre et Jean sur les décisions à prendre :
    "Ce n’est pas par lâcheté et par peur, mais pour empêcher la totale extermination qui nuirait à l’Église du Christ. … Pourquoi n’avons-nous pas pu rester à Béthanie ? Pour ce motif. Pourquoi n’est-il plus prudent de rester dans cette maison, ou dans celle de Nicodème, ou dans celle de Nique ou d’Anastasica ? Toujours pour ce motif. Pour empêcher l’Église de mourir par la mort de ses chefs."[7]

    Son nom

    Anastasica, vient de la "rose de Jéricho", Anastatica hierochuntica, appelée aussi "rose de la résurrection" (Anastasis en grec). Voir ci-dessous. Le nom savant actuel s'inspire-t-il du nom antique ?

    Où en parle-t-on dans l'œuvre ?

    EMV 360 EMV 365 EMV 366 EMV 367 EMV 368 EMV 370 EMV 371 EMV 375 EMV 376 EMV 378 EMV 399

    EMV 402 EMV 441

    EMV 511 EMV 528 EMV 566 EMV 596

    EMV 638 EMV 648

    En savoir plus sur ce personnage

    Extraits du Dictionnaire des personnages de l’Évangile, selon Maria Valtorta (Mgr R. Laurentin, F.-M. Debroise, J.-F. Lavère).

    La rose de Jéricho (Anastatica hierochuntica) à la particularité de pouvoir se dessécher pendant 50 ans, jusqu'à ne représenter que 3% de sa masse initiale, puis de reverdir en deux heures. De ce fait, elle est souvent appelée "rose de la résurrection" (en grec : anastasis). Cette racine est conforme au nom employé par Maria Valtorta : ANASTASICA et non ANASTATICA, son nom botanique. Cette connaissance intrigue. Trouve-t-elle un fondement dans l'histoire ? Le botaniste allemand Heinrich Marzell (1885-1970) fait remonter l'origine du nom au Siracide (Ecclésiastique).[8] Il parle des "roses de Jéricho" au verset 24,14 (ou 24,18) : "quasi plantatio rosae in Hiericho (comme un plant de rose dans Jéricho)". Certains traduisent par lauriers-roses, mais le nom botanique, Anastatica hierochuntica, indique bien son origine : Jéricho, pour autant que la citation du Siracide désigne bien cette plante.    

    Qu'est devenue Anastasica ? Les Actes des apôtres[9] parlent d'une certaine "Rose" désignée sous le nom grec de Rhodé : Elle entend Pierre, miraculeusement évadé de prison, frapper à la porte. Toute à sa joie elle court annoncer la nouvelle à l'assemblée en prière, laissant l'apôtre dehors. Cette Rhodé est présentée par saint Luc comme une "jeune servante".

    Notes et références

    1. EMV 360
    2. EMV 360.11-14
    3. EMV 370.15
    4. EMV 370.18
    5. EMV 528
    6. EMV 638.19
    7. EMV 648
    8. Ursula Brunold-Buger, Die Rose von Jericho, 1977.
    9. Cf. Actes 12, 12-16.