Osservatore Romano (1/12/1961)

    De Wiki Maria Valtorta
    Fac-similé de l' Osservatore Romano du 1° décembre 1961

    L'Osservatore Romano (O.R.) de cette date porte un entrefilet étendant la mise à l'Index, prononcée le 16 décembre 1959 et commentée dans l'O.R. du 6 janvier 1960, à une nouvelle édition en préparation. Celle-ci, la seconde, en dix volumes, s'étendra de 1961 à 1967[1].

    Le contexte[modifier | modifier le wikicode]

    Cet entrefilet doit être placé dans le contexte de la visite au Saint-Office du Père Corrado Berti où il fut "appelé" un an auparavant, en décembre 1960.

    Il y rencontra un nouveau commissaire, le Père Marco Giraudo, un dominicain[2]. Voyant qu'il pouvait dialoguer calmement cette fois-ci[3], il lui rapporta les mots prononcés en audience par le pape Pie XII en 1948, et lui fournit la photocopie des attestations sur les écrits de Maria Valtorta qu'avaient rédigé trois consultants du Saint-Office : le futur cardinal Augustin Bea, Mgr Ugo Lattanzi et le Père Gabriel Roschini. Le Père Berti raconte la suite:
    "Le Père  Giraudo, qui ignorait tout des paroles de Pie XII et des attestations de ces trois personnages du Saint-Office lui-même, reçut plusieurs fois le P. Berti par la suite. Après avoir consulté ses supérieurs et réfléchit sur les attestations, il prononça ces paroles : "Continuez à publier cette seconde édition Nous allons voir comment le monde la reçoit"[4].  Et c'est ainsi que Le Poème est sorti, et continue à sortir, non seulement par ordre de Pie XII, mais aussi avec l'approbation du Saint-Office (1961)[2]".
    C'est donc avec l'autorisation verbale du commissaire du Saint-Office (qui en avait référé à sa hiérarchie) que la seconde édition s'est poursuivie. Cette anecdote explique peut-être la forme et le contenu de cette extension de condamnation, sobre et modérée, qui contraste avec la grandiloquence de la première. Entre décembre 1960 où le Père Berti est rappelé au Saint-Office (plusieurs fois par la suite) et l'entrefilet du 1° décembre 1961, un article anonyme (usage inhabituel) était sorti dans Civiltà cattolica en date du 1er juillet 1961 (cahier 2665) qui écrivait une charge virulente à propos de la seconde édition :
    "(Cette œuvre est) un monument de la puérilité, des fantasmes et des faussetés historiques et exégétiques, diluées dans une atmosphère subtilement sensuelle, dues à la présence d’un essaim de femmes à la suite de Jésus. Un monument, bref, de pseudo religiosité."

    Le communiqué[modifier | modifier le wikicode]

    Texte italien reconstitué[modifier | modifier le wikicode]

    "È in corso di pubblicazione, senza il necessario imprimatur, un opera in più volumi, dal titolo Poema dell’Uomo-Dio di Maria Valtorta. Si avvertono i fedeli che tale opera, la quale non ha alcun valore scientifica, riproduce la stessa materia contenuta nel quattro volumi già condamanati dal S. Offizio il 16 dicembre 1960 (A.A.S. vol. LII | 1960 | p. 60) e perciò essa deve ritenersi parimente condamnata (cfr. Can. 1398 § 2 e Can. 1399 n. 5 C.I.C.)"

    Traduction française indicative[modifier | modifier le wikicode]

    « Il est actuellement en cours de publication, sans l’imprimatur requis, une œuvre en plusieurs volumes intitulée Le Poème de l’Homme-Dieu de Maria Valtorta. Les fidèles sont avertis que cette œuvre, qui n’a aucune valeur scientifique, reprend la même matière que celle contenue dans les quatre volumes déjà condamnés par le Saint-Office le 16 décembre 1960 (Acta Apostolicæ Sedis, vol. LII | 1960 | p. 60). Par conséquent, elle doit être considérée comme également condamnée (cf. Can. 1398 § 2 et Can. 1399 n. 5 du Codex Iuris Canonici). »

    Commentaires et hypothèses[modifier | modifier le wikicode]

    Ce communiqué laisse l'impression d'un service minimal, en décalé par rapport à ce qui est présenté comme une désobéissance grave et publique, presque comme un défi. Le Saint-Office avait promis des sanctions (29 novembre 1948) si le Père Corrado Berti continuait de s'occuper de l'œuvre (ce qui était le cas ici[5]) et l'avait convoqué (22 février 1949) à cet effet[6]. Mais rien ne se passa à son encontre par la suite.

    D'autre part, la mention que l'œuvre "n’a aucune valeur scientifique" étonne et semble marginale (ce n'est pas un motif canonique de condamnation). Il faut sans doute y voir une allusion à la préface du premier tome qui sort à cette date: elle a été rédigée par le Luciano Raffaele, secrétaire général de la Société italienne de Parapsychologie[7]. C'était un malheureux stratagème imaginé par le Père Corrado Berti pour faire passer les visions de Maria Valrorta comme un phénomène parapsychologique. Maria Valtorta s'était insurgée contre une telle idée[8]. Cette initiative fut vite retirée.

    On ne sait pas encore (2025) ce qui a motivé la nouvelle convocation du Père Corrado Berti, ni qui l'a commanditée (le Père Marco Giraudo découvre manifestement le dossier). Il faut sans doute rapprocher ces éléments de la création, après la mort de Pie XII (octobre 1958) d'un nouveau dossier Maria Valtorta qui ne devait donc pas contenir tout l'historique, notamment celui relatif à la position de Pie XII que le Père Marco Giraudo découvre avec ceux de ses soutiens. Ces évènements devaient cependant être restés dans les mémoires. On conjecture qu'une autorité du Vatican s'en est souvenu et serait à l'origine de cette nouvelle entrevue débouchant sur l'autorisation verbale d'imprimer.

    L'hypothèse Mgr Giovanni Battista Montini (Paul VI)[modifier | modifier le wikicode]

    Mgr Montini durant ses années de service à la Secrétairerie d'Etat

    Parmi toutes les hypothèses possibles, on peut s'intéresser à Mgr Giovanni-Battista Montini, futur Paul VI, celui-là même qui abolira l'Index. Il avait été Substitut des affaires générales à la Secrétairerie d'État de Pie XII (dont il était quotidiennement proche) au temps des démêlées avec le Saint-Office. Nommé archevêque de Milan le 12 décembre 1954, il n'est plus en poste au Vatican en 1960, mais il restait une figure écoutée et consultée par Jean XXIII. Il le consultait régulièrement, notamment sur les affaires internationales, les nominations épiscopales et la préparation du futur concile Vatican II. Le cardinal G.B. Montini n'a pu que lire la mise à l'Index dans l'Osservatore Romano et a du faire remonter le soutien du Pape défunt au Vatican ce qui aurait déclenchée l'intervention "diplomatique" évoquée ici.

    Cette hypothèse est fondée en plus sur les cinq indices suivants:

    • Fait: C'est le Pape qui a transformé le Saint-Office en congrégation pour la Doctrine de la Foi (1965) et supprimé l'Index (1966).
    • Hypothèse: En 1960, c'est Mgr Domenico Tardini longtemps collègue de Mgr Giovanni Battista Montini, qui est le Secrétaire d'État du Pape Jean XXIII pour quelques temps encore. Il était aussi au courant de l'affaire Valtorta et de la demande d'imprimatur de Pie XII (25 octobre 1948). La communication officieuse en a du être facilitée.
    • Témoignage: Selon le Père Corrado Berti, au cours d'un entretien d'une heure environ avec son secrétaire, Mgr Macchi, il apprend "avec un vif étonnement, il a été dit et répété que l’œuvre (de Maria Valtorta) n'était pas à l'index". Il était donc au courant de l'épisode.
    • Fait: D'autre part, Mgr Macchi lui confie, dans ce même contexte, que Paul VI, alors archevêque de Milan, avait lu en partie Maria Valtorta[9], l'avait apprécié et commandé l'ouvrage pour le grand séminaire.
    • Fait: Il a fait envoyer une lettre d'encouragement au Père Gabriel M. Roschini pour son ouvrage louangeur sur "La Vierge Marie dans les écrits de Maria Valtorta".

    La "repentance" du Saint-Office[modifier | modifier le wikicode]

    Il faut sans doute fixer à cette date et dans ce contexte la "repentance" du Saint-Office qu'évoque plus tard Mgr Mario Crovini à Emilio Pisani lors d'une rencontre fortuite en 1982. En tant que substitut de la Suprême congrégation du Saint-Office et premier censeur de l'Église catholique, c'était un adjoint du cardinal Alfredo Ottaviani. Il confie : "Nous nous sommes aussitôt repentis d’avoir mis à l’Index l’Œuvre de Maria Valtorta." Il devait en savoir beaucoup, note E. Pisani, "mais une imprudence de ma part le bloqua, et il ne dit rien de plus. Je m’en mors encore la langue !". La publication minimale de l'entrefilet semble en être une conséquence sans éclairer sur les causes.

    Notes et références[modifier | modifier le wikicode]

    1. Réédition de cette seconde publication sur Internet archives.
    2. 2,0 et 2,1 Père Corrado Berti : déclaration sous serment (1978).
    3. Ce n'était pas le cas lors de sa précédente convocation où il n'avait pas pu parler.
    4. Dans ses carnets, à la date du 12 mai 1949, Maria Valtorta avait noté: "Toute mon amertume (suite à la tentative de destruction de l'œuvre) se change en joie, de même que le regard soucieux que je portais sur l’avenir, car il m’est dit que je verrai l’Œuvre être approuvée ; mais je mourrai avant qu’elle ne soit publiée." (Les Carnets, p. 212).
    5. COLLECTIF - Maria Valtorta, Qu'en penser ?, CEV, 2024 : Témoignage d'Emilio Pisani, pp. 31 à 34.
    6. Saint-Office - Tentative de destruction de l'oeuvre de Maria Valtorta (1949), Chronologie des évènements.
    7. COLLECTIF, Maria Valtorta, Qu'en penser ?, CEV, 2024, p. 34.
    8. Dans une dictée du 8 février 1949, Jésus avait dit à Maria Valtorta :"Que personne ne se permette jamais de qualifier de “scientifique” l’Œuvre que je t’ai donnée. La science, dans ce cas, ne saurait être expliquée que comme un phénomène de médium, donc satanique." (Les Carnets, p. 197).
    9. C'est aussi ce qu'a fait le Pape François quand il était cardinal en Argentine.